Le saisissement de l'écriture comme sublimation
La rencontre entre un enfant et un psycho-pédagogue se fait toujours autour d'un objet intermédiaire, utilisé dans une activité et un dispositif spécifiques. Cet objet est appelé à faire médiation entre l'enfant et les savoirs, entre l'enfant et l'activité intellectuelle. Il s'agit de se servir de cet intermédiaire pour permettre à l'enfant d'accéder à ce qui est visé : qu'il remette son désir en jeu dans sa scolarité, y retrouve une place de sujet, se l'approprie, découvre du plaisir dans l'activité intellectuelle, etc...
Je m'inscris volontiers dans la perspective de Francis Imbert lorsqu'il parle des médiations
comme de dispositifs d'inter-pellation conduisant le sujet à prendre place dans un circuit
d'échanges et de réciprocité comme un parmi d'autres. Il parle "d'effet médiation" lorsque ces
dispositifs ouvrent un champ de réciprocité, mettent le sujet en mouvement, permettent
l'émergence du désir et du devenir sujet. C'est un effet d'ouverture concernant les
protagonistes de la rencontre - l'enfant comme l'adulte - qui est visé et non pas une production
bien ficelée ; il n'est ni prévisible, ni programmable. En effet, "l'ouverture ne se déduit pas de
la seule présence d'une réalité définie comme médiation". F. Imbert cite une histoire de la
culture du bassin méditerranéen racontée par Jacques Lacan, et qui illustre cette idée de
médiation et de son effet d'ouverture. "Un vieil arabe décide de distribuer ses biens entre ses
enfants. Il a trois fils. L'aîné aura la moitié, le puîné le quart et le cadet le sixième. Mais
comment le partage peut-il s'effectuer lorsqu'il y a onze chameaux en jeu ? Comment
procéder sans devoir mettre à mort un ou plusieurs chameaux ? Les frères commencent à se
disputer. Le père intervient alors. Il annonce qu'il donne un douzième chameau et précise que
celui-ci lui reviendra plus vite qu'ils ne le pensent." Cette position de tiers symbolique tenue
par le douzième chameau, permet l'ouverture aux échanges, au partage, à la réciprocité. F.
Imbert en fait le paradigme de la médiation ; le travail avec des médiations consisterait à
inventer le douzième chameau.
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